L’Association des cimenteries s’oppose à l’implantation des nouvelles entreprises
25 mars 2025INDUSTRIE
Le Ministre des Mines, de l’Industrie et du Développement Technologique, Pr Fuh Calistus Gentry a effectué du 17 au 21 mars 2025 une visite de travail dans les industries de la région du Littoral. Cette tournée était l’occasion de toucher du doigt les préoccupations des différents secteurs industriels. La rencontre de débriefing organisée à la fin de cette mission a favorisé un dialogue entre le secteur public et le secteur privé sur la politique industrielle du Cameroun dans l’optique d’envisager un meilleur développement du tissu industriel. La question de l’ouverture du marché du ciment à l’implantation des nouvelles cimenteries a été au centre des échanges.
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Le Ministre des Mines, de l’Industrie et du Développement Technologique (MINMIDT) a.i., Pr Fuh Calistus Gentry a effectué du 17 au 21 mars 2025 une visite de travail dans la mégalopole économique de la région du Littoral qui l’a conduit dans les industries des villes d’Edéa et de la Dibamba, dans le département de la Sanaga-Maritime, il va se poursuivre dans les bourgades de Nkaké, Bekoko, dans le département du Moungo et à Bonabéri dans le département du Wouri. Lors de sa première étape dans la Sanaga-Maritime, le MINMIDT a fait le tour de quelques cimenteries et carrières installées dans ce département. C’est ainsi qu’il va visiter dans la ville d’Edéa, la nouvelle cimenterie SINAFCIM. L'entreprise qui met sur le marché le ciment de marque CIMACO et annonce la création de plus de 200 emplois, ambitionne d’atteindre une production d'un million de tonnes par an. Le deuxième arrêt sera à la société de cimenterie Central Africa Cement (CAC) qui projette de produire un 1,5 million de tonnes de ciment par an. Par la suite son cortège va s’arrêter sur les rives du fleuve Dibamba où est installé la société de cimenterie Yousheng qui déclare avoir une capacité annuelle de production de 1,8 million tonnes par an.
A la fin des cinq jours de cette mission à Douala, le MINMIDT a.i., Pr Fuh Calistus Gentry va organiser dans un hôtel de la ville de Douala, un brunch de concertation en guise de débriefing pour un dialogue franc entre le secteur public et le secteur privé. Une occasion pour adresser les problématiques auxquelles sont confrontées les industries de métallurgie, sidérurgie, raffinerie, cimenterie, hydrocarbures, Chimie, Agro-industriel, Agro-alimentaire, Constructions, textiles, Aciéries,…. Lors de cette phase des échanges avec les industriels et parties prenantes sur les axes de la politique industrielle du Gouvernement, notamment le développement sur place des chaines de valeurs de nos matières premières (calcaire, pouzzolane, feldspath, argile, bauxite, fer, cacao, coton etc…), la restructuration des sociétés ALUCAM et CICAM, le respect des procédures réglementaires relativement à l’octroi des agréments portant sur les incitations à l’investissement et la promotion des champions nationaux en matières de développement de projets industriels, la question de l’ouverture du marché à l’implantation des nouvelles cimenteries a été houleuse. Pour le Président de l’association des Producteurs de Ciment au Cameroun (APCC), M. Bertrand Mbouck, par ailleurs, DG de Dangote Cement Cameroon SA, les indicateurs ne sont pas favorables pour décider le gouvernement d’autoriser l’installation d’une nouvelle cimenterie.
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L’argumentaire de l’APCC
Au-delà de la politique d’incitation aux investissements du Cameroun, même si l’industrialisation est le pilier central de la Stratégie Nationale de Développement 2020-2030 (SND30) qui vise la transformation structurelle de l’économie, il reste que la décision du Gouvernement devrait être commandée par trois déterminants : - Le marché ; - Les facteurs de production ; et - La réglementation. Le Président de l’APCC va dans un premier pan, rappeler le gap qu’il y a entre la production nationale et même sous-régionale (Zone Cemac) pour montrer que les huit (08) cimenteries qui sont installées sont loin de rentabiliser leurs investissements. « Le Cameroun a une capacité installée de production actuelle d’environ 12 millions de tonnes pour une consommation de 4,3 millions de tonnes par an. C’est-à-dire que la consommation est de 1/3 de la capacité de production ». Et de poursuivre : « La capacité de production installée en zone CEMAC est d’environ de 15 millions de tonnes de production par an pour une consommation annuelle de 5,6 millions de tonnes par an. Ce qui veut dire que la capacité de production installée au Cameroun est le double de cette demande ». Un indicateur du marché qui démontre que le Cameroun n’est pas attractif pour les potentiels investisseurs. Par conséquence, le Gouvernement ne peut inciter les investisseurs dans un marché s’il ne peut pas leur garantir le minimum de rentabilité de leurs investissements. Dans un pays comme le Sénégal, où la consommation annuelle est de 3,5 millions de tonnes par an, la capacité de production locale est de 7 millions de tonnes par an et est assurées par quatre (4) acteurs.
Pour le deuxième déterminant, il va relever les énormes difficultés que ce secteur rencontre dans l’approvisionnement en énergie électrique. Indiquant que le concessionnaire du transport et de la commercialisation de l’énergie électrique au Cameroun, Enéo ne peut pas satisfaire la demande au regard des capacités nationales de production actuelle du Cameroun. Non seulement, il brille par les coupures intempestives qui détruisent des tonnes de production en cours de fabrication, mais encore, il faut payer une facturation du KW en augmentation de 15%. Soulignant que toutes les perspectives montrent, au regard des efforts consentis par l’Etat et les solutions alternatives qui sont annoncées que ce n’est pas dans six (6) voire même 2 ans que cette situation va être résolue. Même les solutions palliatives comme le gaz qu’on avait annoncé en grande pompe comme un apport conséquent pour maintenir les industries à flot connait les mêmes problèmes d’approvisionnement. Gaz du Cameroun n’arrive plus à satisfaire ses engagements depuis des années avec les industries avec lesquelles, elle est contractuellement liée. Pis encore, lorsqu’elle doit approvisionner le gaz industriel, cette société décide d’approvisionner soit quatre (4à jours sur une semaine de commande ou une semaine sur un mois avec en prime une augmentation de 20% du prix à payer.
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Le MINMIDT n’entend pas fléchir
Le troisième facteur évoqué par le président de l’APCC est la réglementation. Rappelant qu’au Cameroun si pour entrer on brandit la libéralisation, dans le fonctionnement les industries doivent faire face à la régulation du marché. Contrairement à un pays comme la Côte-d’Ivoire où on fixe le prix planché en terme du niveau en dessous duquel vous ne pouvez pas vendre ce qui favorisent la rentabilité des investissements, au Cameroun c’est l’inverse, on fixe le prix planché au-dessus lequel vous ne devez pas vendre. « Dans ces conditions, les cimenteries installées ne peuvent pas avoir la rentabilité espérée », souligne Bertrand Mbouck. Et de poursuivre : « Si on libéralise au niveau de l’entrée qu’on libéralise aussi au niveau du prix ». Un argumentaire qui ne semble pas convaincre le MINMIDT, Fuh Calistus Gentry : « Je peux déjà vous dire que le chiffre que vous avancez sont contestés en termes de consommation locale. Nous avons une contre-expertise menée en vue d’adresser le problème d’écart entre l’offre actuelle de ciment et la demande qui montre que la production actuelle se situe à 4,8 millions de tonnes et la demande globale est projetée à environ 10 millions de tonnes par an ». Sur la question, de l’approvisionnement en énergie électrique, il rassure : « L’Etat a déjà identifié le problème énergétique et les solutions connues seront apportées à court et à moyen termes. D’ici quelques temps ces problèmes vont disparaitre. Attendons que les infrastructures énergétiques installées soient achevées et fonctionnées à leur plein régime ».
Un peu goguenard, le MINMIDT va déclarer que le Gouvernement ne peut pas freiner la politique d’industrialisation du Cameroun prônée par le Chef de l’Etat devant l’intérêt croissant des investisseurs. « Alors dites-moi, pourquoi lorsqu’un investisseur qui fait au préalable une étude de marché peut voir que le marché est saturé et décide tout de même de vouloir investir des millions FCFA ». Finalement, il va relativiser : « On va travailler ensemble pour trouver une solution qui arrange tout le monde ». Toutefois, il y a des voix qui se sont joint au débat. C’est le cas du président de la section industrie de la Chambre de Commerce d’Industrie, des Mines et de l’Artisanat (CCIMA) Cameroun pour qui le Cameroun ne gagne rien en augmentant les industries de cimenteries dans le même schéma de production. A l’instar d’apporter un nouveau paradigme dans la technologie qui permettrait de limiter l’exportation de la matière première et privilégier la matière première locale. Un autre économiste qui porte la voix des consommateurs soutien que l’ouverture du marché aux nouvelles industries de cimenterie seraient favorable pour le consommateur d’abord parce qu’il y aura une saine concurrence qui va concourir aussi bien à l’amélioration de la qualité qu’à la baisse des prix.
Mathieu Nathanaël NJOG
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