Le REDHAC et trois OSCs victimes des représailles arbitraires du MINAT
09 déc. 2024DEFENSEURS DES DROITS HUMAINS
En exécution des arrêtés du Ministre de l’Administration Territoriale du 06 décembre 2024, interdisant de toutes activités sur le territoire national aux organisations de la société civile suivantes : RED6+HAC, Reach-Out Cameroun, LM Nanje Foundation Inc, ACSCC et REDHAC 2, le Sous-préfet de l’Arrondissement de Douala 1er est descendu au siège du Réseau des Défenseurs des Droits Humains d’Afrique Centrale avec des éléments des Forces de Maintien de l’Ordre où il a apposé des scellés. En réplique, la Co-présidente du Conseil d’Administration, Me Alice Nkom, relevant les violations des procédures a brisé les scellés pour répondre à une violation par une autre violation. C’est à se demander quel message le Gouvernement de la République envoie au monde entier en pleine semaine de la célébration de la Journée internationale des Droits Humains.
Le Ministre de l’Administration Territoriale (MINAT), Paul Atanga Nji a signé le 06 décembre 2024 d’une part, trois (03) arrêtés suspendant pour une durée de trois (03) mois, toutes activités des organisations de la société civile suivantes : L’Association dénommée : le Réseau des Organisations de Défense des Droits de l’Homme en Afrique Centrale (REDHAC) dont le siège est à Douala, l’Ong Reach Out Cameroon (ROC) dont le siège est à Buea, et l’Association Charitable Socio-Culturelle du Cameroun (ACSCC) ; et d’autre part, deux (02) arrêtés ne reconnaissant pas la légitimité et la légalité des organisations dénommées : LM Nanje Foundation Inc représenté par Mme Forteh Ngochi Wase Usan, et le Réseau des Défenseurs des Droits Humains en Afrique Centrale (REDHAC). Pour les trois premiers, il leur est reproché les motifs ci-après : « - Financements illicites, et exorbitants en inadéquation avec le profil de l’activité ; - Activités de nature à porter atteinte à l’intégrité du système financier national ; - Absence de justification de la destination des financements reçus ; Non-respect des dispositions légales relatives au fonctionnement d’un organisme à but non lucratif ». Et aux deux dernières, le motif est : « le défaut d’autorisation et activités de nature à porter atteinte à l’intégrité du système financier national. » Parmi les Organisations de la Société civile (OSC) ainsi sanctionnées, certaines sont réputées être des défenseuses des droits humains au Cameroun à l’instar du REDHAC et du ROC. Ce qui a suscité un certain émoi au sein de l’opinion publique surtout lorsqu’il a été constaté que ces interdictions arrivent à la veille de la célébration de la Journée Internationale des Droits de l’Homme. Et que les arrêtés précisent en leur article 2, soit que : « Sont et demeurent interdite sur toutes l’étendue du territoire nationale, pendant la période de suspensions toutes les activités » de l’organisation concernée. Soit que : « Sont et demeurent interdites sur toute l’étendue du territoire national, toutes activités, publications, réunion et manifestations initiées ou soutenues » de l’organisation concernée.
Le libellé et le timing de ces arrêtés restent questionnables. Ce d’autant plus que d’une part ils arrivent à quelques mois des grands enjeux électoraux, notamment l’élection présidentielle qui devrait se tenir au plus tard en début du mois d’octobre 2025. Et d’autre part, ils frisent un acharnement ciblé et portant atteinte à la construction d’un Etat démocratique. « Le faire à la veille de la Journée Internationale des Droits de l’Homme, cela revêt un autre symbole vicieux. C’est comme si le Gouvernement de la République veut passer un message fort à l’opinion nationale et internationale pour dire : Nous, au Cameroun, nous piétinons les Droits de l’Homme. C’est pourquoi nous scellons la principale organisation qui travaille sur les Droits de l’Homme au Cameroun », a relevé Philippe Nanga, Coordonnateur de l’Ong Un Monde Avenir. Pour pousser le vice jusqu’à son comble, le MINAT a sommé le Sous-préfet de l’Arrondissement de Douala 1er de prendre toutes les dispositions pour sceller le siège du Réseau des Défenseurs des Droits Humains en Afrique Centrale (REDHAC) qui est aussi celui du Réseau des Organisations de Défense des Droits de l’Homme en Afrique Centrale (REDHAC). Une homonymie qui serait une simple erreur de saisie au moment de délivrer les documents afférents à l’accord de siège. Car le REDHAC est une organisation internationale qui se déploie sur la région CEEAC. Comme un crime n’est jamais parfait, le Sous-préfet de l’Arrondissement de Douala 1er, Arnaud Heungap s’est permis d’aller sceller les locaux du REDHAC sans avoir au préalable notifié la décision à qui de droit. « La logique élémentaire voudrait qu’il nous signifie cette décision qui aurait été prise un vendredi. C’est maintenant qu’ils sont en train de demander qu’on l’imprime et qu’on la leur apporte, alors que les scellés ont déjà été apposés depuis 9h38min. Tout le monde peut constater que ce n’est pas normal, et que cette démarche s’appelle mettre la charrue avant les bœufs. Pendant qu’ils attendent l’arrivée de la notification, nous sommes certes tous dehors, mais eux, je leur ai mis hors de la barrière », souligné Me Alice Nkom, Co-Présidente du Conseil d’Administration du REDHAC.
Finalement, la notification a été arrivée à 10h35min. Lorsque le Sous-préfet s’en est allé vers 11h30, Me Alice Nkom qui avait déjà promis aux autorités qu’après leur départ elle brisera les scellés a mis sa promesse en exécution. En soutenant qu’il s’agissait de répondre « à un acte illégal par un acte illégal ». Et surtout de ne pas laisser prospérer une violation grave qui entrave la vie d’une organisation dont la mission est de construire une société juste et équitable. « C’est trop fort, pour laisser indifférent toute organisation ou tout défenseur des droits de l’Homme. C’est pourquoi, je crois que cela doit être un acte qui touche et qui appelle à la mobilisation nationale et internationale », souligne Philippe Nanga, Membre du Conseil d’Administration du REDHAC. Et de poursuivre : « Prendre un tel acte en plein célébration des Droits de l’Homme, c’est dire aux défenseurs des Droits Humains et des organisations afférentes que vous ne devez pas exister. Dans ce cas, que le Gouvernement de la République prenne officiellement et courageusement la décision de dire : Nous ne voulons plus des défenseurs des Droits Humains au Cameroun ». Et de conclure : « Curieusement, cela arrive quelques semaines après le passage du Cameroun devant la Commission des Droits de l’Homme, Civiques et Politique de l’ONU et à la Commission de Lutte contre la Torture à Genève. Où on a vu le représentant du Ministère de la Justice et l’Ambassadeur du Cameroun en Suisse défendre bec et ongle là-bas que le Cameroun est un pays lui respecte les Droits de l’Homme et aujourd’hui, on constate que c’est tout le contraire ». Surtout que les Avocats du REDHAC qui ont été mobilisés à l’annonce de la descente du Sous-préfet et sa suite peuvent faire remarquer que les décisions remises n’étaient pas les originaux, mais une copie des documents diffusés sur les réseaux sociaux. En outre, qu’on ne peut pas incriminer une organisation de faire dans le financement illicite et la suspendre de toute activité seulement pour une durée de trois (03) mois. Un délit qui est sévèrement condamné par le Code pénal et qui devrait nécessiter l’ouverture d’une procédure judiciaire. Comme si, trois mois après, le motif imputé va se régler tout naturellement. Par ailleurs, ils ont fait remarquer que les associations ne sont pas soumises à une procédure de justification de leurs avoirs au MINAT comme c’est le cas pour les Ongs. Et de constater : « Qu’il y a manifestement une volonté de nuire au REDHAC et à son exécutif ». Surtout que le MINAT n’est pas une institution financière, n’a pas la compétence nécessaire pour relever les infractions financières d’une organisation.
Mathieu Nathanaël NJOG
Article à lire aussi sur :
- Notre blog : https://njogmathieu.over-blog.com/
- notre chaîne Le Canard LIibéré 237 via WhatsApp : https://whatsapp.com/channel/0029VagMxDHAe5VrxdGnj72H
- notre site web: http://www.lecanardlibere237.com/post
- Nos pages Facebook, Twitter et Instagrame
-et nos versions Tabloïde et Magazine