GROGNE DES DECLARANTS EN DOUANES

Depuis le 4 juillet 2022, les Déclarants en Douane observent un mouvement d’humeur visant à suspendre les opérations de déclarations dans toutes les transactions douanières pour protester contre le caractère essentiellement répressif et la très grande rudesse de l’Administration Douanière. Les conséquences financières sont importantes.

A l’esplanade du Guichet Unique du Commerce Extérieur (GUCE), les bancs d’attente sont déserts et les guichets ne connaissent pas les affluences habituelles. En revanche, à l’extérieur de  l’entrée de l’immeuble siège du Port Autonome de Douala (PAD), les Déclarants en Douane sont regroupés en petits groupes dans les espaces verts, les devantures des Snack-Bars, qui sont leur lieu de retrouvailles quotidiennes.  Contrairement au fonctionnement habituel qui consister à l’attente des potentiels clients, à la constitution des dossiers de déclarations, à leur suivi, cette fois-ci, il s’agit plus tôt de toute une autre ambiance teintée de tension. Celle d’une part de mener une sorte de sentinelle pour contrôler ceux des leurs qui essaient de ne pas respecter le mot d’ordre de suspension des opérations de déclarations dans toutes les transactions douanières entré en application depuis le 4 juillet 2022. Et d’autre part, de mener autour de quelques bouteilles de bières, de brochettes de viandes et de friandises, des débats de sensibilisations sur le bien-fondé de cette action, les conséquences pour l’administration douanière et les attentes du Collectif des Déclarants en Douanes du Cameroun dont les membres du bureau se retrouvent chaque fin de journée pour évaluer le niveau de réussite du mouvement d’humeur. C’est quasiment la ritournelle au cours des quinze jours ouvrables de ces trois dernière semaines.

Pendant ces réunions d’évaluations, le constat et les photos de l’engorgement des conteneurs au Port de Douala-Bonabéri et au Port de Kribi sont partagés. Mais  aussi l’estimation du manque à gagner que subit l’administration douanière dans ses recettes douanières qui sont estimés à près de 2 milliards de Francs CFA/Jour, soit environ plus près de 30 milliards de Francs CFA au terme des trois premières semaines. Enorme! Un chiffre qui aurait pu être plus important si le Collectif ne se montrait pas compréhensif de laisser certains des leurs membres mandataires des importateurs effectuer ce qu’il qualifie de service minimum des déclarations des transactions douanières sur les sorties des conteneurs des produits pharmaceutiques, pétroliers, et des marchandises en transit. En effet, pour justifier leur mouvement d’humeur, le Collectif des Déclarants en Douane du Cameroun dit refuser d’être complice de l’inflation persistante observée sur le marché depuis des semaines concernant les produits de grandes consommations importés ou dont la transformation finale est faite au Cameroun. Mais aussi d’être les victimes expiatoires des impositions et d’une pression fiscale à outrance. Une situation qui ne prend sa source que dans une hypercentralisation différée du traitement des dossiers des déclarations à Yaoundé malgré un traitement déjà effectué par les administrations des douanes du port de Douala-Bonaberi et du port de Kribi.

Vaste chapelet des récriminations

A l’ire des Déclarants en douane s’ajoute l’absence de base de taxation. « Conséquence sur la même marchandise, les coûts de dédouanement connaissent une augmentation vertigineuse et à la tête du client. Ce qui est répercuté sur le prix de revient et entraine une vie chère que le peuple vit durement dans sa chair au point où il plane allégrement la menace d’une insurrection sociale que le Cameroun avait déjà connu en 2008 », explique-t-ils. Une situation qui est dérivée par la non-application des directives en vigueur. « Le Directeur Général des Douanes (DGD) ne fait pas appliquer les instructions élaborées par le Ministère des Finances à l’instar des dispositions de la Circulaire N°007/MINI/DGD du 11 janvier 2022 précisant les modalités d’application des dispositions douanières et la Note de service N°058/MINFI/DGD du 15 mars 2017 rappelant certains dispositions relatives au contrôle après enlèvement ». Mais aussi le Collectif déplore la non-application des dispositions de l’article 27 du Code des Douanes sur la valeur en Douane et de l’Article 392 du code des Douanes sur la Transaction en Douane. Tout comme la non-matérialisation des résolutions prises lors des dernières concertations avec la DGD. Générant au bout du compte des frustrations que les Déclarants en douane subissent à travers la recrudescence des alertes et blocages, le non-respect des valeurs résiduelles objet de la Loi des finances 2021, la Non application des instructions ministérielles relatives au montant du fret maritime, le non-respect du protocole d’Accord Douane-CDA (avec la multiplicité des  dans la chaine d’obtention des codes additionnels et autres enregistrements).

Comme si cela ne suffisait pas, ils doivent encore subir les perceptions indues à l’instar des frais du Travail Extra Légal (TEL) pourtant déjà perçus au niveau des déclarations comme l’indique le libellé sur quittance Douanes. Et la mission HALCOMI qui ne se limite plus à son rôle régalien qui est celui de traquer les marchandises prohibées se substitue plutôt au mépris de la réglementation aux bureaux de premières lignes tout en tracassant et en extorquant beaucoup d’argent aux importateurs. Pour une sortie de crise, les Déclarants en Douane, restent totalement disposés à toutes les sollicitations dans l’optique de la résolution des préoccupations sus-évoquées. Or certaines indiscrétions font état de ce que le Directeur général a sollicité à plusieurs reprises une réunion avec le Collectif qui a brillé par son absence au prétexte qu’il n’avait pas les moyens de se rendre à Yaoundé et souhaitait que la rencontre ait lieu à Douala. A cela, il faudra aussi qu’il leur soit accordé des exonérations par les différentes administrations portuaires sur des pénalités diverses entrainées par ce mouvement d’humeur.

Maelys Naëlle Nkengni

Article publié dans le journal L'essentiel du Cameroun

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