Fritz Ntonè Ntonè rattrapé par les frasques d’une gestion catastrophique
22 juin 2022AFFAIRE SMID
Après avoir fait feu de tout bois pour s’opposer en vain à l’installation par la Mairie de la Ville de Douala d’un administrateur provisoire, le rapport du Commissaire aux comptes sollicité pour faire l’audit est accablant. Ce qui va corser la procédure en instance au Tribunal Criminel Spécial.
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I- Alerte sur la mort certaine de la SMID
Lors de la session ordinaire du Conseil de la communauté du 1er trimestre 2021, les Grands conseillers après avoir fait le constat d’«une situation financière quelque peu alarmante» avait signé une déclaration enjoignant le Maire de la Ville de Douala, Roger Mbassa Ndinè «de défendre sans concession dans le cadre des procédures judiciaires en cours, d’une part les intérêts de la Ville de Douala,… et d’autre part celles des petits souscripteurs qui avaient été convaincus par l’engagement de la Communauté Urbaine de Douala et qui se retrouve aujourd’hui sans perspective de retour sur investissement». Seulement, le Maire de la Ville fait face à une résistance judiciaire, pour s’opposer à la désignation d’un administrateur provisoire pour faire l’audit de gestion. Cela ne sera qu’éphémère. A la suite du rapport d’audit de gestion au 31 décembre 2021 le Commissaire aux comptes va révéler une gestion catastrophique des finances de la SMID. Globalement, le Commissaire aux comptes dégage pour les exercices 2019 et 2020, des pertes respectives de 579 764 695 Fcfa et 1 900 080 686 Fcfa. Ainsi, la perte cumulée au 31 décembre 2020 s’élève donc à 2 479 845 381 Fcfa induisant un montant de capitaux propres de 1 015 834 619 Fcfa. Ce montant représente 29 % du capital de la SMID dont le montant s’élève à 3 495 680 000 Fcfa. Or l’article 664 de l’Acte Uniforme relatif au Droit des Sociétés Commerciales et du GIE (AUSCGIE) dispose que : « Si du fait de pertes constatées dans les états financiers de synthèse, les capitaux propres de la société deviennent inférieurs à la moitié du capital social, le Conseil d'administration ou l'Administrateur général selon le cas, est tenu dans les 4 mois qui suivent l'approbation des comptes ayant fait apparaître cette perte, de convoquer l'Assemblée générale extraordinaire à l'effet de décider si la dissolution anticipée de la société a lieu». Cette disposition de l’AUSCGIE s’applique dans la situation de la SMID. Ce qui va motiver l’Administrateur provisoire Njoh François Maurice a convoqué les actionnaires des catégories C et D aux assemblées générales spéciales le 22 juin 2022 et à une Assemblée générale ordinaire le 23 juin 2022 aux fins de désigner leurs représentants dans la reconstitution du Conseil d’administration qui est aussi convoqué pour le 24 juin 2022.
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II- La résistance persistance de Fritz Ntonè Ntonè
Seulement, le PCA déchu, Fritz Ntonè Ntonè et le DG, Fabrice Tchingo Petton continuent de faire feu de tout bois pour faire échec à ces initiatives qui visent à relancer la SMID. Dans un communiqué du 17 juin 2022, signé par le PCA déchu, il demande « aux actionnaires de ne pas donner suite à la forfaiture de la convocation de l’AGO » convoquée par l’Administrateur provisoire. Soutenant que ces nouvelles convocations font suite à l’échec de l’Assemblée générale convoquée le 15 juin 2022. Et qu’il s’agit « d’un alibi pour servir de caution à 16 mois d’errance judiciaire et de destruction méthodique et planifiée de la SMID SA ». De même, il s’étonne qu’aucune Assemblée générale des Catégories A et B n’ait été convoquée. Seulement, il appert que la mission de Commissaire aux comptés qui a été attribuée au Cabinet Okala Ahanda & Associés par l’Assemblée générale du 17 aout 2018 révèle qu’au lancement des opérations en vue de la création de la SMID, « pratiquement, aucune des conditions exigées par l’annexe 1 n’a été remplie pour la Notice d’Information et l’Obtention de l’avis de la Commission des Marchés Financiers (CMF) ». Et qu’il y a eu en outre le passage en force des dispositions de l’annexe 1 de l’Instruction Générale N° 002/CMF/04. En ce que « les responsables de la notice, que sont la CUD, EDC (Ecobank), et le cabinet NDOKY DIKOUME, ont sciemment fabriqué des hypothèses financières des projets qui présentent des coûts des investissements, des revenus et des charges purement imaginaires car ne reposant sur aucune base de données de réalisations passées de l’émetteur (SMID) ». Ce qui a eu le hic d’entrainer la surfacturation des droits de visa par la Commission des Marchés Financiers (CMF). Le cabinet Okala Ahanda & Associé souligne que « la CMF a perçu 75 millions Fcfa au lieu de 50 millions Fcfa ». Par conséquence, « le trop perçu de 25 millions Fcfa par la CMF doit être restitué à la SMID ». Il en va de même du contrat pour frais et honoraires signé entre la société EDC et le cabinet Me Ndoky Dikoume pour un montant d’honoraires de 60 millions Fcfa Fcfa. Le commissaire aux compte indique : « Le contrat passé entre EDC et le cabinet NDOKY n’engage pas la CUD et l’autorisation donnée à EDC de payer la facture de ce cabinet à partir des fonds prélevés directement sur le compte de centralisation ne se justifie pas. Cette substitution est irrégulière. Il s’agit d’une fraude ».
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III- Des malversations rocambolesques
Par ailleurs, le rapport d’audit relève aussi que le contrat d’agence conseil en communication signé entre EDC et VOODOO Cameroun pour des honoraires forfaitaires d’un montant de 74 993 000 Fcfa HT « n’engage pas la CUD et l’autorisation donnée à EDC de payer la facture de Conseil en Communication à partir des fonds prélevés directement sur le compte de centralisation ne se justifie pas. Cette substitution est irrégulière. Il s’agit d’une fraude ». Il en va de même du contrat de recrutement d’un « Directeur de projet » signé entre la Communauté Urbaine de Douala (CUD) et Mme KOMNANG née NKOUNDA Julienne qui ne s’appuie sur une résolution de la CUD autorisant le Délégué du Gouvernement à passer le contrat dont il est question. Curieusement, souligne le Commissaire aux comptes : « Avant même le bouclage de l’opération d’appel public à l’épargne l’ordre a été donné à la Société d’Aménagement de Douala (SAD) de procéder au préfinancement des factures présentées par Mme KOMNANG. Ces règlements effectués par la SAD ont été réclamées par la suite à la SMID qui les a payées, bien que n’étant pas partie prenante au contrat ». Et d’ajouter : « En conséquence ces factures [d’un montant de 142 123 298 Fcfa] devaient être payées par la CUD et présentées par elle à l’Assemblée Générale Constitutive à l’effet de statuer sur leur validité comme dépenses engagées pour le compte de la SMID avant la création de celle-ci ». Tout en précisant qu’«en conséquence, Avant même le démarrage des activités, la SMID a perdu la somme de 302 116 298 Fcfa en dépenses non éligibles détaillée ». Une exploitation du compte de centralisation où devait être viré le produit des souscriptions collectées par les Etablissements Placeurs sur le compte de l’Emetteur, qui en l’occurrence est le compte séquestre. Ce qui n’a pas été le cas. Mais à la demande du Délégué du Gouvernement, le Conseil de la Communauté Urbaine de Douala, dans une délibération, l’avait autorisé à y prélever la somme de 250 millions Fcfa, pour « la prise en charge de certaines prestations et honoraires liés à la période de promotion du projet ». Le Commissaire aux comptes souligne qu’«il s’agit d’une manœuvre frauduleuse consistant à autoriser EDC à prélever et à payer directement et à son profit des prestataires avec lesquels il a passé des contrats ».
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IV- Distraction dans le projet de rénovation du marché New-Déido
Le Rapport met aussi en évidence les Fonds collectés par EDC pour le compte de la SMID. Et note que selon la déclaration d’EDC, le montant des fonds collectés s’élève à 4 117 000 000 Fcfa, soir environ 40% des 10 milliards de Fcfa, initialement programmés. Cette somme, à l’évidence ne pouvait financer les deux projets finalement retenus, la rénovation du marché de New Déido et la construction du Parc de loisirs de Besseke. Pis encore, il a été prélevé des fonds collectés une somme de 250 millions Fcfa, pour financer des opérations frauduleuses, en sorte que le montant réellement reçu par la SMID est de 3 867 110 000 Fcfa. Et de déduire que : « Cette somme est dérisoire pour le financement des deux projets qu’il fallait abandonner au lieu de se lancer dans des opérations qui étaient manifestement vouées à l’échec faute de moyens financiers ». Et de constater que les travaux de rénovation et d’extension du Marché New Déido de Douala étaient émaillés de nombreuses défaillances et manquements dans la conduite de ce projet. Projeté sur un coût total des investissements est de 4 152 323 000 Fcfa, le Commissaires aux comptes indiquent que « le financement de ces investissements proviendrait d’une part, des fonds propres de la SMID à hauteur de 1 781 317 000 Fcfa, des cautions des potentiels locataires (10 ans de loyers) à hauteur de 2 056 656 000 Fcfa, et il se dégagerait une dette de 314 350 000 Fcfa dont aucune indication n’est donnée sur la nature de son financement ». Et de poursuivre que malgré le risque que présentait le lancement de ce marché, le Conseil d’administration réuni, en sa session du 13 février 2019 a autorisé le PCA à signer le marché de rénovation et d’extension du Marché New Déido avec la Société NEO INDUSTRY SA pour un montant Ht de 7 419 790 683 Fcfa. Seulement, le rapport d’audit souligne que : «Le prix du marché a augmenté, passant de 7 419 790 683 Fcfa HT à 7 641 488 387 Fcfa HT ». Et de conclure que : « A l’évidence, ce plan d’affaires était voué à l’échec dès le départ pour les raisons suivantes ».
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V- Distraction du projet de rénovation du marché New-Déido
La construction du Parc des Loisirs de Bessèke-Douala constitue le deuxième grand projet de la SMID SA. Pour un coût total des investissements est de 2 138 980 000 Fcfa. Le financement de ces investissements proviendrait d’une part, des fonds propres de la SMID à hauteur de 1 711 184 000 Fcfa, et des dettes de 427 796 000 Fcfa dont aucune indication n’est donnée sur la nature de son financement. A l’évidence, ce projet était voué à l’échec dès le départ pour les raisons suivantes. Donnant lieu de relever de nombreuses défaillances et manquements dans la conduite de ce projet. Appréciation des comptes et des états financiers. Le Cabinet Okala Ahanda & Associés relève aussi des détournements des fonds pendant la période de suspension de la mission de l’Administrateur provisoire pour cause de requête pour défenses à exécution introduite par l’ancienne gouvernance de la SMID. Ainsi du 15 février 2021 au 25 Juin 2021, les anciens dirigeants qui n’étaient plus en fonction après la nomination de l’administrateur provisoire le 12 février 2021 ont signé des chèques a décaissé frauduleusement des sommes importantes des comptes bancaires pour un montant de 113 372 243 Fcfa. Le mécanisme d’enrichissement illicite n’a lésiné sur le moindre encaissement. Le rapport d’audit précise qu’entre le 01 janvier 2021 et le 12 février 2021, la SMID a reçu le remboursement du prêt qu’elle avait octroyé à la Société d’Etude de Douala (SEDO) d’un montant de 208 000 000 Fcfa et effectué des décaissements. Conséquence, après le 25 Juin 2021, la banque Ecobank a enfin produit les relevés bancaires d’où il ressort qu’au 31 août 2021, les fonds qu’elle détient dans ses livres s’élèvent à 26 152 277 Fcfa. Même le matériel roulant n’a pas été en reste. Il ressort que le détournement des véhicules de la SMID qui ont disparu, voire ont été volés par les anciens dirigeants ne sont pas toujours restitués malgré les sommations par voie d’huissier de l’administrateur provisoire.
Mathieu Nathanaël NJOG