Le gouvernement adoube le Patronat, les consommateurs restent dubitatifs
22 mars 2022FLAMBEE DES PRIX
Après que le Ministre du Commerce ait validé la hausse des prix de la baquette du pain, le gouvernement vient à nouveau de reconnaitre que la crise inflationniste est une réalité. Malheureusement, n’apporte toujours pas de solution pour atténuer la souffrance des consommateurs qui ploient sous une hausse généralisée de toutes les marchandises sans exclusive.
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Depuis la validation de la hausse du prix de la baguette du pain, incidemment les autres marchandises ont vu leurs prix connaitre une hausse systématique pendant que le pouvoir d’achat du Camerounais n’est pas prêt à connaitre une revalorisation conséquente. Pis dans un pays où le Smig est de 36 000 FCFA. Soupçonné de vouloir attiser une insurrection, le patronat, qui ne cesse depuis que l’économie camerounaise subit les ravages de la crise sanitaire, les crises sécuritaires et la baisse drastique des cours des matières premières à l’instar du pétrole, de tirer la sonnette d’alarme a rencontrer les organisations de défenses des consommateurs et le Premier ministre, Chef du gouvernement pour présenter la réalité de la situation, s’en départir et appeler à des solutions urgentes des pouvoirs publics. Le 18 mars 2022, le président du Gicam, Célestin Tawamba a conduit une délégation des représentants des différentes filières. Il en a profité pour rappeler que la flambée des prix des matières premières à l’importation enregistrée en 2021 du fait d’un boom des prix des intrants ainsi que du fret maritime, auxquels vient de s’ajouter les conséquences de la guerre Russo-Ukrainienne a fini par accélérer la tendance et entraîné de nombreuses filières dans la dépression. Le risque est désormais celui d’une irréversible inflation et une stagflation, c’est-à-dire une hausse des prix et l'absence de croissance.
Les propositions du patronat
A travers des présentations très illustrées et particulièrement chiffrées, les membres de la délégation du GICAM ont successivement expliqué les manifestations de la crise, ses répercussions sur leurs entreprises et les menaces qu’elle fait peser sur les filières et sur l’économie nationale. Il en ressort que pour les différentes filières, les répercussions sont quasi identiques : - surcoûts de production ; - difficultés d’approvisionnements et indisponibilité des certains produits ; - pression à la hausse des prix de vente ; - pertes de marchés ; - absence de visibilité pour 2022 ; - suspension et réévaluation des programmes d’investissements suspendus ou réévalués ; - dégradation de trésorerie, risque d’insolvabilité, planification de plans sociaux, … La situation est d’autant plus critique que cette inflation importée vient se superposer à d’autres contraintes au plan national l’instar de celles liées à l’extension du PECAE, les transferts à l’étranger, et l’indisponibilité de l’énergie électrique. Face à cette menace, le Président du GICAM en a profité pour souffler le froid et le chaud, d’emblée en saluant les mesures d’accompagnement déjà mises en œuvre par le Gouvernement même si leur impact reste limité face à l’ampleur des surcharges subies par les entreprises. Aussi, il en a profité pour appeler à la mise sur pied en urgence d’un Plan Gouvernemental Anti-Inflation dont les objectifs seraient de : - Garantir la disponibilité des produits ; - Sauvegarder le pouvoir d’achat des populations ; - Eviter les faillites d’Entreprises et ; - Préserver les marges budgétaires de l’Etat.
Le dilemme du gouvernement
Concrètement, ce plan se décliner en un mécanisme de veille et d’information systématique de l’opinion sur l’évolution des prix et de la situation économique, des mesures urgentes portant notamment sur l’optimisation du système de contrôle des prix, un soutien à la trésorerie des entreprises et la suppression de certaines contraintes opérationnelles sur les entreprises. Le plan peut aussi comporter des mesures structurelles à moyen terme adressant entre autres les problématiques de pouvoir d’achat et d’orientation des modes de production et de consommation. En réaction, le Premier Ministre, Chef du Gouvernement qui était en compagnie des Ministres et Directeurs des administrations des régies financières est restés sans voix sur l’état de la situation critique de cette inflation importée et ses menaces. Tout en évoquant l’hypothèque que fait désormais peser cette crise, à court terme, sous l’équilibre du budget 2022 et à moyen terme sur les perspectives d’émergence. Ce qui devrait conduire inéluctablement, au regard de la sévérité de la crise, vers un collectif budgétaire. Il ne fait pas de doute que malgré la résistance des membres du Gouvernement qui ont insisté sur la nécessité de rester dans le cadre légal pour trouver des réponses appropriées, le patronat continue à soutenir que la clé de la démarche devrait alors être le dialogue. C’est ainsi qu’il a été résolu de poursuivre cette concertation sur la crise inflationniste dans le cadre d’une plateforme : Gouvernement – Patronat, qui sera pilotée par les Services du Secrétariat Général du Premier Ministre, avec des déclinaisons par secteur d’activité et par filière en fonction de leur exposition à la crise.
Les consommateurs aux aguets
Cela devrait permettre d’harmoniser les points de vue sur certaines évaluations d’impacts et de déficits, et d’envisager des allégements de procédures et des accompagnements spécifiques selon les filières. Mais aussi, des besoins précis pourront être mis en évidence pour susciter des ajustements des cadres programmatiques avec les Partenaires Techniques et Financiers au développement (PTF). Le patronat estime qu’il sera nécessaire d’établir une convergence de vue sur les évaluations des déficits de la production locale dans les secteurs des oléagineux et brassicole. Ainsi que de suspendre le PECAE. Concernant le transport maritime, la constitution d’un armement national est une piste à creuser même si le système de partage des flux qui permettaient aux armements nationaux de survivre n’existe plus. En revanche, le Gouvernement est dans un dilemme cornélien de satisfaire aux propositions du patronat et de prêter une attention particulière au sort des plus pauvres pendant cette période trouble. Surtout que lors de la rencontre entre le GICAM et les présidents des Associations de défense et de protection des droits de consommateurs, ces derniers avaient relevé l’exigence d’une amélioration du pouvoir d’achat des populations pour faire face au changement de paradigme économique auquel est confrontée l’économie camerounaise. C’est dire que les instruments tels que le Programme Filets Sociaux et d’autres initiatives de transferts sociaux pourront être mobilisés pour soutenir leur accessibilité aux produits de première nécessité.
Mathieu Nathanaël NJOG
Article publié dans le journal L'essentiel du Cameroun