Menacés d’expulsion par le projet de construction d’un l’Hôtel
23 nov. 2021HABITANTS DE BALI-DIKOLO
Depuis plusieurs semaines un bras de fer oppose les populations autochtones du canton Bell aux autorités administratives. Les habitants du quartier Dikolo à Bali sur le plateau Joss de la ville de Douala, multiplient des manifestations pacifiques pour s’opposer à leur déguerpissement afin de favoriser la construction d’un hôtel du Groupe américain Marriott International.
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Samedi 20 novembre 2021, les habitants du quartier Dikolo dans le village Bali de Douala sont sortis en masse. Tout de noir vêtue, arborant les tenues traditionnelles (page et chemise pour les hommes, kaba avec au tour des reins un foulard pour les femmes), ils ont engagé une marche pacifique de protestation contre la cession de leurs terres à un opérateur économique résidant aux Etats-Unis qui a présenté au gouvernement camerounais un projet de construction d’un hôtel 5étoiles avec le partenariat du Groupe hôtelier américain Marriott International. Cette énième manifestation a été réprimée de manière la plus énergétique par les Forces de maintien de l’ordre qui sont sorties avec les camions anti-émeutes du GMI N°2 de la ville de Douala. La centaine de manifestants a été foudroyée avec des puissant jets d’eau gazeuse jusqu’à dans les concessions. Essuyant le coup, ils ont battu en brèche, avec au passage quelques étourderies enregistrées, non sans s’avouer vaincus, puisqu’ils ont promis de descendre à nouveau dans la rue le 27 novembre 2021 pour continuer à se faire entendre jusqu’à ce que le gouvernement s’avise. Pour cette prochaine manifestation, des élites appellent tout le peuple Sawa particulièrement des cantons Bell, Akwa, Deido et Bele Bele de s’unir pour défendre leurs terres. Certains n’ont pas caché leur courroux devant le silence complice du Chef supérieur du canton Bell, S. M. Eboumbou Douala Manga Bell, ceci malgré les appels incessants de ses administrés. Au point que certains le soupçonne d’avoir été mouillé et sur les réseaux sociaux des messages sont diffusés appelant à sa démission.
En effet, le fonds d’investissement avec à sa tête, Olivier Chi Nouako, un avocat canadien d’origine camerounaise, par ailleurs PDG d’Immigration and Business Canada, entreprise dont le siège social est basé au Canada a obtenu du Ministre des Domaines, du Cadastre et des Affaires Foncières (MINDCAF), henri Eyebe Ayissi la cession d’une superficie de 4 hectares au lieu-dit Pont Joss, au quartier Bali-Dikolo, village Njo-Njo dans le canton Bell, Arrondissement de Douala 1er. Il envisage de construire un hôtel Marriott International 5 étoiles d’une capacité d’hébergement de 280 chambres. Il comprendra entre autre une salle de conférence de 1 000 places, d’une piscine, d’un centre d’affaires, d’un casino et des espaces de loisirs parmi les attractions en vue. Le coût du projet est estimé à 60 milliards de FCFA. Les travaux étaient prévus démarrer en janvier 2020 pour être livré courant 2023. Malheureusement, la résistance des habitants du site retarde le lancement du chantier. Après avoir été reçu en audience en aout 2021 par le MINDCAF, Henri Eyebe Ayissi, pour exprimer leur désarroi, le 5 novembre 2021, le Préfet du Wouri, Benjamin Mboutou va leur adresser une sommation de déguerpir sans aucune indemnisation ni proposition de recasement et assorti d’un délai de 30 jours. C’est alors que les habitants du site et les populations autochtones ont décidé de multiplier les actions de protestations pacifiques. D’abord en saisissant les autorités compétentes jusqu’au Premier ministre, Chef du gouvernement pour montrer les violations de cette cession qui ne tient ni compte des dispositions en vigueur en la matière, ni de l’occupation du site d’une part par des habitants qui y sont installés depuis plus de 50 ans à la faveur de la construction du chemin de fer et des habitations des employés affectés à la gare ferroviaire de Douala-port. Donc certains sont à la retraite sans pension depuis la privation de la REGIFERCAM. Et d’autre part, ni des populations autochtones du village Njo-Njo, propriétaire de ses terres.
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Pour Henri Moukouri Manga Bell, élite autochtone et habitant le quartier Bali-Dikolo, cet espace « est une propriété du canton Bell. Des familles descendants du héros national Rudolf Duala Manga Bell, figure historique de la résistance contre les expropriations du pouvoir colonial Allemand y vivent depuis plus de 250 ans ». Pis encore, cet espace fait partie des actifs résiduels de l’ex-REGIFERCAM dont la récente bataille entre le Gouvernement et le Cabinet Lazard Atou a révélé qu’un décret présidentiel a interdit toute cession des titres fonciers des actifs résiduels des ex ONPC, ONCPB et REGIFERCAM, ainsi qu’il a annulé toutes les cessions effectuées aussi bien par ledit Cabinet que par le MINDCAF. Tout en instruisant de reverser dans le domaine privé de l’État les terrains appartenant aux ex-RNCF et ONCPB. Ce qui explique qu’on pouvait lire sur plusieurs pancartes les messages suivant : «Halte à l’atteinte de la mémoire de Rudolf Duala Manga Bell» ; «Halte à l’injustice aux Bonanjo» ; «libérez les TF 48/W, 120/W, 37780/W, TF 731/W, TF 6348/W, TF 1348/W, TF 27592/W, TF 46772/W, 17642/W» ; «Ouvrez une enquête sur le TF 750/W de 826 m2 de Bali» ; «Oui à l’annulation du TF n° 22407/W » ; «L’hôtel Marriott n’est pas d’utilité publique». Certains soupçonnent le Chef supérieur du canton Bell d’avoir été mouillé dans cette affaire.
Mathieu Nathanaël NJOG
Article publié dans L'essentiel du Cameroun