Le patronat implore une plus forte médiation de la Banque Mondiale
22 sept. 2021VISITE OUSMANE DIAGANA
Le Groupement Inter-patronal du Cameroun était l’une des étapes importantes de la visite officielle du Vice-président de la Banque Mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et Centrale, Ousmane Diagana au Cameroun. Le mercredi 15 septembre 2021, il a rencontré à Douala le patronat pour un échange riche, fructueux et empreint d’espoir.
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Lors de sa séjour officielle de 48 heures au Cameroun, en sa qualité de nouveau Vice-président de la Banque Mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et Centrale, Ousmane Diagana après avoir rencontré les autorités gouvernementales à Yaoundé, est allé à Douala le 15 septembre 2021 où il a rencontré entre autre le Groupement Inter-patronal du Cameroun (GICAM) comme représentant du secteur privé dans les instances bipartites nationales en charge des consultations et des missions conjointes FMI/ Banque Mondiale organisé dans le processus d’élaboration et de mise en place du plan d’ajustement structurel. Une aubaine que le patronat camerounais a saisie pour porter leurs craintes et leurs aspirations sur l’état de santé de l’économie camerounaise et les conditions d’une reprise économique efficace. Le Président du GICAM, Célestin Tawamba, ne va pas s’en cacher : «Autant vous dire combien sont grandes nos attentes ce matin auprès de vous dont le rôle de tout premier ordre au plan de conseils au Gouvernement ainsi qu’au financement de notre économie pour le moins affaibli ces dernières années ». Parce que, cette institution de Brettons Wood est considérée par le patronat comme étant des rares privilégiés « qui murmurent dans les oreilles des Chefs d’Etat et de leurs Gouvernements. C’est ainsi que la Banque Mondiale est perçue par nous», soulignera-t-il
Célestin Tawamba au grand bonheur des hommes d’affaires présents va peindre l’environnement des affaires au sein de l’économie camerounaise comme étant très difficile accentué par des crises économiques et sanitaires. Il s’est aggravé en 2020 avec la survenance de la pandémie du Covid-19 avec son impact négatif sur les activités. A cela s’ajoute des obstacles et blocages qui réduisent la capacité des entreprises à créer la valeur ajoutée et des emplois. Rappelant que ces pesanteurs et freins ne sont pas étrange au mauvais score qui sont ceux su Cameroun sur l’échiquier international où «sur les dix dernières années notre pays toujours figuré parmi les 25 pays où le climat est moins favorable aux affaires ». Mettant à l’index l’administration qui brille par son incapacité à faire échec aux reformes, multipliant lenteurs, tergiversations et même travestissement. Comme prposition, le Gicam plaide pour une réforme complète du Cameroon Business Forum (CBF) et son remplacement par une nouvelle plate-forme dont l’organisation et le mode opératoire ont fait l’objet des propositions patronales au Gouvernement. Afin qu’il ne s’agisse pas simplement de transformation cosmétique mais d’une véritable transformation dans le fond, la forme et la méthode.
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Piste de solutions
Le GICAM va aussi relever quelques embûches au développement des affaires. - La pression fiscale qui a pour conséquence que peu de créateur de richesses paient l’impôt, « c’est un fait, c’est inadmissible », reconnait le président du GICAM. Malheureusement, la minorité qui assure ses responsabilité paie chère avec un taux d’imposition global qui cumule les 57% de revenus pour les entreprises… Du coup l’impôt sur les sociétés peut atteindre 100, 200 et 500% du bénéfice et il est même porté par les entreprises qui enregistrent les pertes. « Cette curiosité camerounaise est contre toute logique fiscale. Cette pression fiscale annihile tous les efforts des chefs d’entreprises », déplore Célestin Tawamba. - Un système judiciaire balbutiant et inefficace où l’on observe l’absence des tribunaux de commerce qui renchérit les coûts de la justice commerciale et rallonge les délais d’obtention des décisions de justice qui sont en moyenne de 800 jours, largement au-dessus de la moyenne observée dans les pays de la zone franc, qui est en l’occurrence d’une année. Ce qui entretient une insécurité juridique et judiciaire permanente. - Une offre infrastructurelle largement insuffisante au regard de défis de l’industrialisation, notamment en ce qui concerne l’énergie électrique et des télécommunications avec un maillage de la fibre optique qui reste faible. - L’accumulation de la dette intérieure due aux entreprises qui est de près de 2000 milliards FCFA dont la titrisation reste attendue bien qu’inscrite dans la loi des finances 2021. - Une inclusion financière qui demeure faible qui se traduit avec en 2020 un taux de bancarisation 28,3% au Cameroun et un taux d’accès aux services financiers qui est 55%. Autrement dit moins d’un camerounais sur trois dispose d’un compte bancaire.
Pour inverser la tendance, le président du GICAM : - La définition d’un nouveau cadre de dialogue entre le secteur public et le secteur privé ; - Un changement de paradigme fiscal pour sortir de la fiscalité budgétaire pour une fiscalité de développement avec notamment un pacte d’engagement entre public et privé ; - Une réforme du système judiciaire avec l’implémentation des tribunaux de commerce ; - Une réforme du secteur des télécommunications ; - Un accompagnement des partenaires au développement à la relance des économies et non pas seulement l’ajustement macroéconomique et budgétaire ; - Un accompagnement du secteur privé par les organes opérationnels de la Banque mondiale, notamment la SFI.Pendant les échanges, les nombreux chefs d’entreprises présents ont sollicité que la Banque Mondiale joue un rôle de pression auprès du Gouvernement pour que la voix du patronat soit entendu dans un cadre tripartite à mettre en place auquel cas, elle sera perçue comme une institution d’aide au sous-développement. Reconnaissant la pertinence de ces préoccupations dont certaines font déjà l’objet d’actions de la part de la Banque Mondiale, le Vice-président et sa délégation ont tenu à apporter quelques éclairages et précisions. Notamment sur la pression fiscale qui est une réponse à la baisse de l’aide au développement. Toutefois, Ousmane Diagana a précisé que la Banque Mondiale apporte ses conseils sur les problèmes bien identifiés. Tout en précisant que la Banque Mondiale n’a pas le pouvoir d’imposer aux Etats les actions à mener, il a pris l’engagement de contribuer au mieux pour un redémarrage du cadre de dialogue public-privé plus efficace, le constat de l’échec du cadre existant étant relevé dans de nombreux pays.
Mathieu Nathanaël NJOG
Article publié dans le journal L'essentiel du Cameroun