La société Cameroon Tea Estate s'achemine vers une fermeture
23 sept. 2021CRISE ANGLOPHONE
Subissant de plein fouet les ravages de la crise sécuritaire qui sévit dans les régions anglophones en général et celle du Nord-Ouest en particulier, la société Ndu Tea Estate, plus immportante des quatre filiales de la Cameroon Tea Estate, du milliardaire Baba Ahmadou Danpullo, risque de fermer ses portes et envoyer près de 15 000 travailleurs au chômage.
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La crise sécuritaire que les Régions anglophone du Nord-Ouest et du Sud-Ouest (NOSO) traversent est très préoccupante. Depuis fin 2016, les ravages se font ressentir négativement sur le plan économique, où la paralysie quasi-générale des activités n’est pas sans conséquence sur la production, le déploiement, et notamment au niveau des échanges commerciaux entre les entreprises de ses deux régions avec le reste du pays et le grand voisin le Nigeria. Depuis 2017, des entreprises emblématiques de ces régions telles que la CDC, PAMOL, CTE, etc… se retrouvent en quasi-arrêt d’activités, accumulant d’importants arriérés en termes de dettes fournisseurs et de dettes sociales et forcées de licencier des personnels. Cette situation a contribué à faire naître et aggraver une crise humanitaire avec des millions de déplacés aussi bien interne (1,5 million sur l’ensemble du territoire national) qu’externe (un million au Nigéria).
Après avoir essayé de faire preuve d’une résilience patriotique, la Cameroun Tea Estate (CTE), rachetée par le milliardaire Baba Ahmadou Danpullo en 2002 à la suite d’une privatisation décidée par l’Etat, arrive en paie le prix au plus fort. Singulièrement ses filiales de Ndu Tea Estate et Ndawara Tea Estate dans le Nord-Ouest et Tole Tea Estate dans le Sud-Ouest et dans une moindre mesure Djutitsa Tea Estate situé dans le village Bafou pastorale, département de la Menoua (région de l’Ouest). La filiale Ndu Tea Estate, située dans le département du Ndonga-Mantung, région du Nord-Ouest, est la plus grande des quatre filiales de la CTE avec une superficie de 1 568 hectares pour une production d’environ 1 600 tonnes de thé vert par an sur un production globale de CTE qui est de 5 000 tonnes thé. Cette situation pourrait avoir pour conséquence la mise en chômage de ses quelques 15 000 employés, selon des sources internes à l'entreprise.
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Et pour cause, comme dans toutes les sociétés de ces deux régions, elle a subit de graves actes de violence, banditisme et vandalisme allant jusqu’à la destruction de son matériel roulant et même vu la menace d’incendie planer sur les plantations et unité de transformation de Tole Tea Estate, Ndawara et surtout Ndu Tea Estate. C’est le cas deux camions transportant du thé de Ndawara Tea Estate qui avaient été incendiés en décembre 2018 par les groupes armées séparatistes qui sèment la terreur sur les civils et mènent une guerre asymétrique aux forces armées et de sécurité. C’est dire l’urgence que le gouvernement camerounais a à intervenir pour soutenir cette entreprise, qui, avec les autres installées dans ces régions anglophones représentaient avant cette crise sécuritaire 20% de la production agricole du pays et une grande partie des filières agricoles d’exportation avec 45% de la production cacaoyère nationale pour le Sud-Ouest, 70% de la production de café arabica pour le Nord-Ouest, plus de la moitié de la production d’huile de palme, 90% de la production du thé et 20% de la production de féculents (maïs, manioc, pomme de terre, banane douce). Preuve s’il en était besoin que le NOSO représente un véritablement grenier agricole du Cameroun et par ricochet leur paralysie contribue à faire naître et aggraver les crises de devises.
Mathieu Nathanaël NJOG
Article publié dans le journal L'essentiel du Cameroun