Le Comité de travail s’inquiète du silence gouvernemental
22 juil. 2021CRISE ANGLOPHONE
Les organisations de la société civile Stand Up For Cameroon et Un Monde Avenir font remarquer dans le rapport du mois de juin 2021 sur les droits humains, que la situation s’enlise et demeure alarmante. Malheureusement, le pouvoir de Yaoundé brille par un silence qui frise l'indifférence.
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Dans son rapport sur les droits humains du mois de juin 2021, le Groupe de Travail que les organisations de la société civile Stand Up For Cameroon (SUFC) et Un Monde Avenir (1MA) pilotent, il ressort que le Cameroun continue d’être le théâtre de multiples violations des droits humains du fait de la persistance des conflits dans différentes régions. «Même si l’on dénombre une inflexion du nombre d’incidents violents, il convient de souligner le caractère particulièrement grave de certaines atteintes aux droits humains perpétrés par les belligérants dans les zones de conflit. Ainsi, on a pu enregistrer au mois de juin 2021», souligne Geneviève Oum, représentante d’Un Monde Avenir. De manière plus explicite, les statistiques tenus et qui sont pas exhaustifs indiquent qu’au moins 44 incidents violents au total dont 21 incidents meurtriers, 16 incidents violents non meurtriers, 03 incendies, 03 explosions dues à l’usage des engins explosifs improvisés et 04 kidnappings ont été enregistrés au cours du mois de juin 2021.
De manière détaillée, il ressort que les 21 incidents meurtriers se répartissent en 17 incidents dans les régions du Nord-Ouest et le Sud-Ouest, 03 dans le conflit contre Boko Haram et 01 autre hors des zones de conflits. Ces incidents meurtriers ont causé au moins 66 morts dont 61 décès dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, 04 morts dans le conflit contre Boko Haram et 01 mort en dehors des zones de conflit. Au moins 14 personnes kidnappées dont 09 dans les régions du Nord-Ouest et le Sud-Ouest et 05 dans la lutte contre Boko Haram. L’un des incidents les plus saillants de ce mois ont été l’enlèvement le 15 juin 2021 par les milices séparatistes de cinq (05) délégués départementaux et un (01) chef de service départemental. Il s’agit des délégués des Ministères de l’Économie, de la Planification de l’Aménagement du Territoire (MINEPAT); de l’Habitat et du Développement Urbain (MINHDU) ; de l’Eau et de l’Energie (MINEE), et des Petites et Moyennes Entreprises (MINPME), de l’Economie Sociale et de l’Artisanat (MINESA) et du Chef service départemental des Domaines.
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Le pouvoir de Yaoundé résigné ?
Deux jours plus tard, le Délégué départemental du MINEPAT, Mabia Johnson Mudika, 42 ans, avait été exécuté, et des vidéos circulaient faisant état de ce que les autres sont sous forte menace, en attendant le versement de la rançon. Depuis lors, le gouvernement ne communique sur les cinq autres fonctionnaires en captivité. Sont-ils encore vivants ? Des mesures sont-ils pris pour leur libération ? Les a-t-on abandonnés à leur triste sort ? Des questions qui restent sans réponse. «Force est de constater que le gouvernement brille depuis lors par un silence qui frise l’indifférence», indique le Groupe de travail. De quoi rester dubitatif sur l’absence de couverture sécuritaire des Force armées qu’ils auraient bénéficié au cours de cette descente sur le terrain alors qu’ils allaient procéder à une démarcation en vue de faciliter un travail de construction des lignes électriques. Le Groupe de Travail de conclure que «pour le pouvoir de Yaoundé, plus les exactions sont commises dans les deux régions en crise, plus ils font tout pour détourner leur attention»
Un feedback permet de constater que le 6 janvier 2021, le convoi du Préfet avait été attaqué par les forces séparatistes à son retour, 4 éléments des Forces de défense et de sécurité et la déléguée départementale du Ministère des Communications de Momo, Becky Jeme Iyabo, avaient été tués. Trois ans plus loin en arrière encore, le 11 février 2018, le sous-préfet de Batibo, Diteng Namata, avait été enlevé le jour de la célébration de la fête de la jeunesse, et avait également été exécuté quelques temps après. L’observation effectuée depuis janvier 2021 par le Groupe de Travail permet de relever de manière cumulée qu’au moins 391 personnes ont été tuées dans les régions de l’Extrême-Nord, du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Soit au moins 149 morts dans la lutte contre Boko Haram et 229 morts dans la crise anglophone. Au moins 104 personnes kidnappées dont 77 dans la crise anglophone et 27 dans la lutte contre Boko Haram. Au moins 38 explosions et incendies provoqués par les groupes en lutte dans les régions de l'Extrême-Nord et les régions anglophones.
Mathieu Nathanaël NJOG
35 RECOMMANDATIONS
Aux autorités camerounaises, il est fortement recommandé de :
- En finir avec les violences sur les civils à travers des opérations punitives collectives des forces de défense et de sécurité,
- Assurer le strict respect des droits des prévenus durant les arrestations et les détentions,
- Mettre fin aux pratiques de torture et autres traitements dégradants,
- Libérer les personnes arrêtées en violation totale des lois et procédures camerounaises,
- Faire la lumière sur des dossiers clés relatifs à de graves violations des droits humains,
- Mettre en place des cadres de dialogue, de suivi des engagements et de correction des dysfonctionnements observables sur l’ensemble du territoire.
Aux groupes armés dans les zones en conflit, en particulier dans les régions du Nord – Ouest et du Sud – Ouest,
- Mettre fin à la violence contre les civils,
- Mettre fin aux attaques contre les agents de l'État,
- Mettre à la disposition de la justice internationale les personnes coupables de crimes dans leurs rangs,
- Renoncer à l'utilisation des armes comme moyen politique pour atteindre leur cause.
Aux citoyens, journalistes, leaders d’opinion et organisations de la société civile camerounaise :
- Mutualiser les efforts dans le suivi et la documentation des cas de violences et des violations des droits humains au Cameroun,
- Mutualiser les efforts dans le cadre de l’information et la formation des citoyens sur les droits de l’homme,
- Mutualiser les efforts dans les actions de plaidoyer au niveau national et international,
- Mutualiser les efforts dans la défense et la protection des victimes et des défenseurs des droits humains,Aux organisations internationales et les pays partenaires de l’Etat du Cameroun, il est fortement recommandé.